Atteinte du nerf sciatique : traitement et lien avec la reprogrammation neuromotrice
Définition
La sciatalgie ou l’atteinte du nerf sciatique est une pathologie très fréquemment rencontrée avec une prévalence de 2% des adultes de la population française soit plus de 1,3 millions de personnes [1]). Elle se présente sous forme d’une douleur irradiante en regard du trajet du nerf. Il existe des formes d’atteintes plus ou moins graves. La forme la plus rencontrée est celle causée par une hernie discale. Elle peut également être de forme dégénérative (arthrose, rétrécissement canalaire) ou traumatique qui peut engendrer des sensations d’engourdissement, de la faiblesse musculaire, voire une paralysie.
Le nerf sciatique est le nerf le plus long et le plus volumineux de l’organisme. Il naît de la moelle épinière au niveau du bassin et innerve jusqu’au bout des orteils en donnant plusieurs collatérales sur son chemin. Sa fonction motrice est essentiellement la flexion de la jambe et du pied, et l’extension du pied également. Son territoire sensitif s’étend sur la face postéro-latérale de la jambe et l’ensemble du pied [2].
Une paralysie de ce nerf sciatique peut provoquer une difficulté voire l’impossibilité de fléchir le genou, de se relever ou de se mettre sur la pointe des pieds. Cela va causer par la suite une sous-utilisation du membre inférieur avec des conséquences parfois importantes telle que la boiterie. Cela peut causer des compensations et donc des douleurs dans d’autres régions.
Traitement de la sciatique
Concernant la prise en charge rééducative, les grands axes à privilégier sont de réaliser des étirements, de la mobilité, du renforcement du tronc (gainage) puis progressivement passer du statique au dynamique, tout en augmentant la charge en adapté.
Il est primordial de traiter de façon systémique et non uniquement en local.
Nous pouvons prendre l’image du corps humain comme un élastique tendu de la tête aux pieds. Si une zone de l’élastique devient tendue – qui peut être représentée ici par la partie postérieure de la cuisse – les autres parties en amont et en aval vont subir une diminution de leur longueur et vont donc devoir s’adapter. Cela se traduit souvent par des raideurs, et celles-ci s’appliquent souvent dans les zones les moins résistantes comme les extrémités des membres. C’est pourquoi les semelles orthopédiques peuvent avoir un intérêt intéressant en complément de la rééducation, et ce dans le but de les sevrer par la suite et non de les garder à vie en restant passif.
Persistance des symptômes
Malgré le fait d’avoir travaillé sur ces différents aspects, il se peut que le patient se plaigne encore de gênes, ou que celles-ci partent pendant un certain temps puis reviennent. C’est là que nous nous remettons en question pour savoir quel aspect nous avons négligé. Très souvent, nous ne nous penchons pas sur l’aspect mental du mouvement. Autrement dit, nous pourrions utiliser des techniques permettant d’améliorer la compréhension d’un geste précis en se concentrant sur comment mon cerveau visualise le mouvement.
En effet, tout mouvement maîtrisé nécessite une bonne visualisation et les ressentis du geste. La technique de visualisation mentale est beaucoup discutée et utilisée de façon importante dans plusieurs disciplines sportives et encore très peu en rééducation. C’est pourquoi il manque encore beaucoup d’écrits là-dessus. Mais ne serait-il pas intéressant de s’intéresser de façon plus centrale sur nos méthodes de rééducation au lieu de se focaliser surtout sur l’aspect périphérique ?
Traitement par la reprogrammation neuromotrice Allyane
La reprogrammation neuromotrice a une place importante tout au long de la rééducation chez nos patients. En effet, le cerveau représente le centre de commandes, et donc il est logique de s’intéresser davantage sur l’utilisation de méthodes plus « centrales ». La méthode Allyane consiste à un travail couplant imagerie mentale, identification proprioceptive du geste défini en stimulant de façon pluri-sensorielle via des sons de basse fréquence émis par un dispositif médical. Ces séquences de sons permettent de synchroniser les ondes cérébrales au rythme alpha, rythme propice à l’apprentissage moteur en visualisation. [3,4,5]
Le bilan est crucial pour l’élaboration des axes de travail à réaliser. Il n’y a rien de nouveau sur l’analyse des différents bilans (douleur, moteur, sensitif, fonctionnel, questions sur les activités de la vie quotidienne et sportive). Le praticien réalise un bilan clinique précis, avec notamment l’aide de la vidéo pour l’analyse biomécanique et l’explication au patient des points à corriger.
La plupart du temps, la sciatique engendre une boiterie du fait de la position antalgique. Le patient parfois ne s’en rend pas compte, et la vidéo permet de lui faire prendre conscience de cela. La prise vidéo est quelque chose de facile à mettre en place au cabinet avec toutes les aides technologiques d’aujourd’hui.
L’échange inter-praticiens est une nécessité. Le médecin qui apporte les informations générales et surtout diagnostiques, l’approche ostéopathique sur l’aspect biomécanique en plus de la kinésithérapie, le suivi orthopédique sur le plan postural. Cette prise en charge pluridisciplinaire devient intéressante et surtout nécessaire pour effectuer des bilans et axer le mieux que possible le patient.
Le déroulé d’une séance Allyane
Après avoir fini le bilan et recueilli les objectifs du patient, la séance consiste en général à travailler sur la réactivation d’un ou de plusieurs muscles qui ont été en quelque sorte « oubliés » par le cerveau, que nous appelons inhibition motrice centrale, également connue sous le nom d’Arthrogenic Muscle Inhibition (AMI). Plusieurs publications intéressantes documentent par exemple l’inhibition motrice produite suite à une opération du genou telle que celle des ligaments croisés [6,7]. En théorie nous commençons par la réactivation des muscles stabilisateurs permettant de ressentir de façon plus nette de bonnes sensations d’équilibre. Puis, nous continuons sur les muscles mobilisateurs pour performer la gestuelle notamment sur le plan de la fluidité du mouvement.
Cette méthode est très facile à intégrer dans notre activité de tous les jours, et permet d’avoir un regard encore plus holistique et de comprendre davantage la logique du fonctionnement du cerveau.
Conclusion : place d’Allyane dans le traitement de la sciatique
La rééducation de la sciatique est fréquemment rencontrée au sein de nos cabinets. Il existe toutefois des formes difficiles à traiter, où l’on ne comprend pas toujours pourquoi le patient stagne. Une partie de la rééducation aurait peut-être été laissée de côté, et ce que nous remarquons aujourd’hui, c’est l’aspect plus central du mouvement : comment je réalise ce mouvement et quelles sensations me procurent ce mouvement ?
La méthode Allyane est l’une des méthodes qui peut apporter des solutions et réflexions complémentaires à nos pratiques quotidiennes.
Bibliographie :
[1] VIDAL RECOS (11/2016), Lombosciatiques aiguës commune
[2] Kamina (2009), Anatomie clinique 4ème édition, Ed. Maloine, pp.532-536
[3] Neuper, C., Scherer, R., Reiner, M., and Pfurtscheller, G. (2005). Imagery of motor actions: differential effects of kinesthetic and visual-motor mode of imagery in single-trial EEG. Brain Res Cogn Brain Res., 25, 668-77
[4] Neuper C., Scherer R., Wriessnegger S., and Pfurtscheller G. (2009). Motor imagery and action observation: modulation of sensorimotor brain rhythms during mental control of a brain-computer interface. Clin Neurophysiol., 120, 239-47
[5] Klimesch W. EEG alpha and theta oscillations reflect cognitive and memory performance: a review and analysis. Brain Res Brain Res Rev. 1999 Apr;29(2-3):169-95. doi: 10.1016/s0165-0173(98)00056-3.
[6] Rice DA, McNair PJ. Quadriceps arthrogenic muscle inhibition: neural mechanisms and treatment perspectives. Semin Arthritis Rheum. déc 2010;40(3):250‑66.
[7] Sonnery-Cottet B, Saithna A, Quelard B, Daggett M, Borade A, Ouanezar H, et al. Arthrogenic muscle inhibition after ACL reconstruction: a scoping review of the efficacy of interventions. Br J Sports Med. mars 2019;53(5):289‑98.